« Manger peut vous sauver la vie », Philippe Sionneau
Sans le savoir vraiment, nous assistons, acteurs et spectateurs, à l’écriture de l’histoire : n’étant acteurs que de peu, les faits, souvent, nous sont relatés, s’égrènent rapidement, en nombre chaque jour plus grand, et se sédimentent entre conscience et inconscience, foulés et refoulés.
De ces strates journalières, nous, ou d’autres, extrairons, plus tard, le récit du passé et tenterons de restituer ce que fut le présent d’autrefois.
La nutrition n’échappe pas à la construction inflationniste historique actuelle. Fait social majeur de nos sociétés d’abondance, elle se métamorphose sous nos yeux sans que l’on sache vraiment ce qu’elle va devenir.
Science occidentale récente, dans son acception, elle subit encore les coups et contre-coups d’écoles opposées et d’intérêts économiques concurrentiels, ces derniers s’attachant à prétendre, aujourd’hui, non plus que leurs produits sont sans danger, saine évolution, mais sans risque dans une juste mesure.
Or, il semble que la plupart des apports scientifiques actuels concourent à valider une certaine sagesse, que l’on appellera orientale, encore occultée pour le grand public (allez savoir pourquoi !), alors que la plupart des grands laboratoires investissent là-bas.
L’ouvrage de Philippe Sionneau vient, à point nommé, rappeler les fondamentaux et vous commencez à savoir que j’aime les fondamentaux !
Glucides, protides, lipides, produits laitiers, fruits & légumes, fibres, sont passés, méthodiquement, tranquillement, comme il sait faire, à l’analyse des dernières recherches. Il ne nous parle pas ici de médecine chinois, à quoi bon, puisqu’il traite des bases de nos alimentations et que celles-ci n’ont de géographique que les aptitudes génétiques des populations à gérer les variations d’approvisionnements.
Arriver à faire en sorte que la nutrition sorte du champ thérapeutique où l’occident et ses médecins tentent de la contenir et la faire réintégrer le champ social, banalement social, de l’alimentation semble relever de la gageure.
Comme semble impossible, lointaine, l’étape suivante qui verrait se réunifier alimentation et médecine, tant le temps, depuis leur séparation, s’est écoulé et les acteurs figés.
Alors qu’il eut été plus logique de former tous les médecins à la nutrition qui aurait alors été incluse dans toute anamnèse, notre société voit l’agroalimentaire, par vacuité, faire ce chemin et se parer du label ‘Prévention’, longtemps abandonnée par le politique.
Philippe Sionneau nous dit, et son ouvrage le montre clairement, qu’avec un petit effort d’apprentissage, la volonté peut-être simplement de s’occuper de soi sérieusement, on peut maîtriser rapidement son alimentation sans, pour cela, que la tristesse envahisse le frigo et les araignées les placards.
Bien se nourrir est au contraire joyeux et bon pour les neurones, puisqu’au lieu de tendre mécaniquement la main, en un réflexe pavlovien, vers une boite sur un linéaire, vue à la télé, on va chercher, dans la multitude de produits disponibles, frais et de saison si possible, composer un menu, des plats, en maniant des concepts simples et clairs.
On va peut-être retrouver le chemin des marchés, le week-end, et se rendre compte qu’ils sont bien vivants, peuplés de jeunes producteurs enthousiastes, qui savent parler de leurs marchandises, qui pensent que l’aventure gustative peut débuter avec une simple assiette de cinq variétés de tomates anciennes et qu’une volaille qui a le temps d’extraire un vers de terre, sans avoir à le partager avec deux cents copines, a un autre goût.
On se rendra compte que la nutrition est une science certes (les nombreuses références bibliographiques , ainsi que les nombreux liens vers des sources scientifiques, l’attestent) mais que l’on peut facilement, sans avoir fait médecine, combiner composants des aliments et aliments eux-mêmes et assumer le « devenir ce que l’on mange ».
L’auteur ne se fera pas que des amis parmi certaines grandes sociétés, mais il est au-delà et le pragmatisme aidant, à l’instar du virage sur l’aile en faveur du bio, nous pouvons espérer, au moins, voir disparaître bientôt certains artifices alimentaires préjudiciables à la santé.
« Manger peut vous sauver la vie – Faites les bons choix nutritionnels», Philippe Sionneau, éditions Trédaniel, 2007, ISBN 978-2-84445-864-3
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